Deux derniers procès en fin d’année à Abidjan, début décembre 2020 ont fait parler les piliers du temple de Thémis. L’un a concerné des artistes musiciens et l’autre un religieux. Retour sur quelques temps forts desdits jugements de Yodé et Siro et du Prophète Dian plusieurs mois avant.
Au tribunal d’Abidjan plateau, procès du prophète Dian
Procès au tribunal de première instance d’Abidjan plateau du Prophète Dian, détenu à la MACA depuis maintenant 16 mois (à la date du procès), pour avoir dit une prophétie de la part de son Dieu..
Le juge: Bonjour monsieur. Avez-vous un conseil (avocat)
Prophète Dian: Bonjour président, oui j’ai même cinq avocats, mais j’ai décidé de me présenter ce matin, seul devant vous parce j’ai Jésus avec moi.
Le Juge: Il n’est pas question de Jésus. Répondez oui ou non.
Prophète Dian: Si, s,i si, il s’agit de cela, sinon dans quel cadre je serais devant vous. Vous n’allez pas m’arrêter dans le cadre religieux et refuser que je parle de Jésus. Quelle est cette incongruité ?
Le Juge: Bon, comme vous voulez! On continue… Reconnaissez-vous avoir donné sur les réseaux sociaux des informations qui ont tendance à troubler l’ordre public ?
Prophète Dian: Monsieur le juge, pour commencer, une prophétie n’est pas une information. C’est une prévention, sur cette base j’aimerais donc prévenir. Ce qui est différent d’informer. Ensuite, en bon français, une information qui a tendance à troubler l’ordre public, monsieur le juge, c’est une hypothèse de votre part. Suis-je en prison depuis 16 mois, pour une simple hypothèse ?
(Le prophète très remonté, le ton levé…)
Il faut que tout change dans ce pays ! Vous n’allez pas continuer d’instrumentaliser notre justice au compte du régime. Trop c’est trop ! Sur une simple hypothèse vous me détenez en prison pendant 16 mois. Vous vous cachez derrière une bribe de connaissance du droit avec un français approximatif pour condamner des honnêtes citoyens.
Après un peu de temps de calme, le juge prend la parole.
Le juge: Vous avez fini ?
Prophète Dian: Non, non, je n’ai pas fini. Si c’est pour me condamner à 20 ans faites-le, cela ne me dit rien. Je sais que je sortirai de cette prison un jour. C’est pour vous qui est grave.
Le juge: Monsieur taisez-vous, sinon je vous retourne au violon.
Prophète Dian: Faites ce que vous voulez, c’est votre droit. C’est aussi mon droit de vous demander de dire le droit. Rien ne va continuer ainsi….
Le juge: Amenez-le! (s’adressant aux policiers).
C’est sur ces mots que les policiers partent avec le prophète dans sa cellule…La salle était émue de savoir qu’il y a encore des personnes capables de dire ce qu’elles pensent au risque de leur vie.
Au procès de Yode et Siro droit devant le procureur
Inéluctablement, le procès des artistes du zouglou du groupe Yodé et Siro aura été le procès de l’année en Côte d’Ivoire en 2020. Tant il a cristallisé toutes les attentions et les lumières eu égard à la taille de la personnalité en face des artistes. Le procureur de la république, Richard Adou. Quelques extraits du face à face avec juge et procureur.
Lors de l’audience, Siro répond aux questions du procureur
Procureur: «Monsieur, pourquoi vous critiquez le procureur ? »
Siro : «Monsieur le Procureur, Je ne suis pas allé loin à l’école mais je sais que le Procureur exerce un emploi publique et donc la loi m’autorise en tant qu’ivoirien de critiquer tout ceux qui exercent un mandat publique. Est ce que c’est faux ? »
Toute la salle se lève pour applaudir. Le Procureur, visiblement contrarié, est fâché et menace d’interrompre l’audience.
Procureur : « Monsieur, est ce que vous savez que vos propos sur la supposée arrestation des « Baoulés » frise à un appel à la révolte ? »
SIRO (respire une minute, et répond) : «Monsieur le Procureur, j’étais chez moi à la maison et le Ministre de l’intérieur a dit au journal de 20h que ce sont les petits « Dioula » qui ont été tués alors qu’ils relevaient les barrières qui aurait été faite par les Baoulés. Procureur, dites moi comment le Ministre de l’intérieur sais qui est « Dioula » et qui est Baoulé ? »
En colère, le Procureur reprend en affirmant c’est lui qui pose les questions.
Siro : »Monsieur le juge tout ce que nous chantons n’est pas frontal et il ne faut pas prendre ce que nous disons au premier degré mais avec philosophie et au deuxième degré, parce que quand on vit en société on doit prendre en compte les pensées des autres »
Procureur: « Siro il n’y a pas de courtoisie dans votre musique ? »
Siro : »Dans les notes de la musique, il n’y a pas de courtoisie »
Procureur: « Dans la musique n’y a t-il pas de courtoisie ? »
Siro : »Non dans les notes de la musique il n’y a pas de courtoisie, les notes de la musique sont Do Re Mi Fa Sol La Si, ya pas courtoisie « .
La justice pour tous est toujours attendue dans les tribunaux ivoiriens.
GRACE OZHYLLY
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