Le journaliste-écrivain ivoirien, Sylvain Takoué, semble avoir le vent en poupe en ce moment, tant dans la presse écrite que sur les sites d’informations. La raison ? Son entrée en sport-principalement au football – avec la sortie de son dernier livre-phénomène sur Didier Drogba, aux éditions Scripta, en Côte d’Ivoire : «La FIF en jeu, un joker appelé Didier Drogba« . Nous l’avons rencontré à l’occasion d’une interview de choc, qu’il nous a accordée. L’Auteur, en esprit averti, y dévoile, sans faux-fuyants, ses opinions avec une lucidité rageuse, dont il a le secret. Lisez plutôt.
Votre livre sur Didier Drogba, en valait-il la peine ? Etait-il tant nécessaire, que cela, de le consacrer à quelqu’un qui est déjà aussi célèbre ?
Merci de reconnaître que Didier Drogba est une célébrité. C’est du football qu’il tire son sacre. Une telle icône planétaire méritait aussi qu’un livre lui reconnaisse cela. L’immortalité qui donne la main à l’universalité. Un livre biographique sert à faire ce travail important. Des livres de ce genre sont aussi consacrés à des gloires sportives comme Pelé, Maradona, Zidane, Laurent Pokou, au football, mais également comme Gabriel Tiacoh en athlétisme, Mohammed Ali en boxe, Bruce Lee en arts martiaux. Ce n’est pas nouveau, mais je l’ai fait pour Didier Drogba, parce que cela en valait la peine.
Ce livre sur Drogba vous fait atterrir de plain-pied en sport, un milieu dont on ne vous soupçonnait pas la fibre…
Attendez, je suis un journaliste-écrivain, c’est-à-dire un esprit libre. Il n’y a pas de milieux qui me soient interdits et d’autres où je me confinerais. Je fouine, j’excave. Quand je sens une nécessité de sortir un livre dans un domaine, je le fais. D’ailleurs, je n’ai vu aucun journaliste sportif ivoirien faire ce travail sur Didier Drogba. Aucun. C’est quand même ahurissant de le constater. Surtout à partir du moment où sa candidature à la présidence de la FIF a été un problème inutilement soulevé. Juste des articles sporadiques et passagers, pas de livres à foison pour traiter plus sérieusement de la question.
En Côte d’Ivoire, nos confrères sont plutôt rares à être des journalistes-écrivains, car on n’en voit pas beaucoup. Cela me rappelle une citation de Félix Houphouët-Boigny : « En Côte d’Ivoire, les chercheurs qui cherchent, on en trouve. Les chercheurs qui trouvent, on en cherche ». (Rires). Par exemple, que nos journalistes sportifs ivoiriens ne produisent aucun livre sérieux pour traiter même de la situation chaotique du football ivoirien, est, en cela, une déception. Depuis les 10 ou 15, ou 20 dernières années, il n’y a juste eu que Ricardo Xama de la RTI et Alex Kipré du journal Frat’Mat quoi l’ont fait, publier des livres sur le football ivoirien. Il y en a qui se disent pourtant être de « grosses têtes » en sports. Mais grosses, à quel point ? (Rires).
On vous connaît, jusque-là, comme un confrère qui ne badine pas avec sa plume…
Oui, mais ça n’a pas changé. Si j’étais un militaire pur sang, je dirais que je suis toujours droit dans mes bottes. (Rires).
Oui, et vous rappelez, en cela, un autre grand confrère qu’on a aussi connu ainsi dans le pays…
De Tiburce Koffi, une plume très vive, très critique comme la vôtre…
Je croyais que cette interview m’était réservée. Posez-moi vos questions sur moi. Je crois que c’est plutôt de cela qu’il s’agit, non ? Je me trompe ?
Non. (Rires). C’était juste à titre d’évocation… Mais passons. Votre nouveau livre sur Didier Drogba est fascinant. On en parle déjà beaucoup…
Cela n’a rien d’étonnant, vu que c’est le destin même d’un livre de réflexions de faire jaser. Vous connaissez l’expression « Jeter un pavé dans la mare » ? La mare est pleine de grenouilles qui coassent. Si un livre de réflexions, qui est publié, ne fait pas tant parler de lui, ce n’en est pas vraiment un. Ce serait juste un livre ordinaire, presque banal, qui ne suscite pas vraiment de réactions. Le genre de livres lisses sans mordant, qui foisonnent, d’ailleurs, dans nos librairies ivoiriennes.
Mais si votre livre suscite tant d’intérêt dans l’opinion nationale, c’est parce qu’il s’agit de Didier Drogba, votre héros. Pourquoi ce choix porté sur lui dans votre livre ?
Je voudrais vous répondre : pourquoi pas lui ? (son visage devient des plus sérieux). C’est que Didier Drogba, c’est d’abord la légende du football, que l’on ne connaît que trop. Mais aussi son ambition d’être président de la FIF.
Et alors ? Est-ce un problème d’être, comme vous le dites, Didier Drogba et d’avoir une telle ambition? On sait ce que cela a provoqué au niveau de l’élection à la présidence de la FIF…
Ecoutez, je ne vous comprends pas. Faut-il être plutôt un extraterrestre pour être à même d’être le dirigeant N°1 de la FIF ? Ou bien, la FIF, elle-même, est-elle une planète inaccessible du cosmos, pour un pauvre terrien appelé Didier Drogba ? Je ne le demande pas seulement pour vous, mais aussi pour ceux qui posent un problème à ce fait, au désir d’un homme, d’un sportif de très haut niveau, comme Didier Drogba que l’on connaît très bien, de servir à un poste sportif qu’il estime capable de tenir. Je leur pose, comme à vous, la question suivante : Où est le mal, qu’un citoyen du pays ait cette visée presqu’ordinaire ?
Quelle est, justement, votre lecture de cette situation ?
C’est donc, pour vous, Didier Drogba à tout prix, à vous entendre ? C’est Didier Drogba ou rien ?
Prenez-le comme vous l’entendez, si ça vous fait du bien, mais c’est comme ça. On ne pourrait rien y changer. Vous ne pouvez pas, chez les chrétiens, inventer un autre Jésus-Christ de Nazareth. Vous seriez ridicule, propre à voir comme un hérétique. C’est pareil dans le football. Au football, vous ne pouvez pas, non plus, inventer un autre Didier Drogba de Niaprahio. Vous seriez un… passez-moi le mot…. Je n’ose pas le dire.
(Rires) Je ne vous passerai pas ce mot que j’imagine. (Rires). Mais à vous entendre, Didier Drogba serait le candidat parfait, ou presque ?
Si vous le dites, alors oui. Mais, voyez-vous, c’est quand même incroyable, la mauvaise foi humaine. On est complexé, donc on est forcément dans les petites choses, on ne voit pas grand…
Vous parlez sans doute de ses adversaires ou de ses détracteurs…
C’est la raison pour laquelle on parle de « rêve américain », celui de la grandeur. Je précise mon idée par rapport à Didier Drogba : moi, ce que je sais faire le mieux, c’est de réfléchir et d’écrire des livres qui peuvent servir au monde. J’avance avec cela. Vous comprenez ? Jetez un coup d’œil sur ma bibliographie. Elle vous intéressera. C’est exactement pareil pour Didier Drogba. Drogba n’est pas un forgeron ni un puisatier, quoi que ce soit des métiers nobles. Ce qu’il sait faire le mieux, c’est d’être un acteur actif du football. Depuis ses 5 ou 6 ans, auprès de son oncle Goba Michel, en France, il a eu le ballon rond au bout des pieds, vous le savez.
Vous ne craignez pas d’être pris de court, avec un possible verdict contraire à votre position?
Pris de court, dites-vous ? Mais par qui ? Ou par quoi ? Et vous parlez d’un possible verdict contraire. Est-on en justice avec cette question d’élection sportive, pour parler de verdict ? Si oui, je ne le savais pas. Sinon, on n’a pas besoin qu’un verdict contraire, comme vous l’évoquez, vienne s’étaler comme une tache d’ombre là où il va faire jour. Ce serait ridiculiser le sport-roi lui-même, dans notre pays. Ce dont on a besoin, c’est qu’un vrai projet de relance du football ivoirien, vienne sauver la situation désespérée que vit ce sport dans notre pays. Et quelqu’un d’outillé propose, justement un tel projet viable. Avez-vous lu son projet « Renaissance » ? Dites-moi, lequel des autres candidats, en peut autant. Quel est leur background et quels sont leurs atouts majeurs dans le domaine du football ? Soyons sérieux ! On parle ici de réalité concrète, et pas de vendre du vent aux gens. Le temps de la mystification est fini, puisqu’on parle maintenant d’assainissement du football ivoirien.
C’est, justement, pour assainir le football ivoirien, qu’un comité de normalisation est instauré par la FIFA ? Que pensez-vous, d’ailleurs, de ce comité de normalisation ?
Votre livre n’en parle pourtant pas…
Mais parce que ce n’est pas un livre qui fait la promotion de la FIFA. Les actes de la FIFA parlent d’eux-mêmes, et c’est suffisant. Et ce n’est pas la FIFA qui est le problème dans ce dossier ivoirien.
On dit que le problème, c’est Didier Drogba…
Qui, on ? Ecoutez, là on ne va pas s’entendre du tout, vous et moi. En quoi pense-t-on que Didier Drogba serait le problème ? Je crois plutôt que certains Ivoiriens qui le pensent, ont un problème avec eux-mêmes. C’est leur égo qui est fouetté. La chose est plus forte qu’eux. Donc, il faut forcément faire du bruit absolument inutile, et de la plus mauvaise manière, autour du projet Drogba. Ce n’est pas juste. Apprenons à ne plus être si pauvres d’esprit. C’est une tare, ça. Mais ça se soigne, heureusement. Il suffit d’avoir de la bonne foi. Un Bon Samaritain très qualifié arrive avec une potion d’élixir pour guérir notre grand malade qu’est le football ivoirien, et il s’en trouve des gens qui, arc-boutés dans des machinations sombres, ne veulent pas de cette guérison attendue. Incroyable !
Et vous avez bon espoir que ce sera le cas ?
Etes-vous personnellement de ceux qui veulent que ce ne soit pas le cas ? Il n’y a pas de raison pour que Daizoko ne sorte pas vainqueur de l’élection à la présidence de la FIF. Il a le background et les atouts qu’il faut. Je l’ai dit quelque part, il est notre Roi Pelé. Dites-le aux autres.
Vous espérez aussi le retrait, en douceur, de la candidature des adversaires de Drogba ? Eugène Diomandé, le président du Séwé de San-Pedro, l’a fait très tôt, lui…
C’est une chose qu’il a dans le sang. Ça lui bouillonne dedans, l’honnêteté intellectuelle. Ce n’est pas pour rien qu’on le surnomme Gbagbadèh, le tonnerre. Ses adversaires n’ignorent pas cela. Comme le disait Arafat Dj pour ses propres concurrents musicaux, « Champi, les voilà qui tremblent. Ils ont peur… Vous ne pourrez rien ». L’élection aura lieu. Allons-y seulement… Au bout des décomptes, Didier Drogba sera l’élu. Ce n’est plus loin.
ledebativoirien.net
Interview réalisée par J-Y. B.