DECRYPTAGE
Nos traditions, corrompues par la criminelle politique politicienne, sont malmenées, voire bafouées au point que les luttes pour le pouvoir, au mépris de compromis dynamiques, sont devenues toxiques. Et c’est une division dans la division qui met en péril, non seulement la cohésion nationale mais aussi la paix entre les membres d’une même communauté, qui se regardent en chiens de faïence.
Ainsi, chez les Baoulé, deux théories irréconciliables s’affrontent pour la succession au 12è roi, Nanan Kouakou Anougblé III, décédé en 2002 et inhumé le 7 mars 2016.
Et la lutte fait rage autour de la reine-mère, N’Ga Tanou Monique, baptisée Nanan Akoua Boni II qui a assuré la régence de la cour royale, et son fils utérin, Kassi Anvo Michel, nommé Majesté Ôtimi Anvo Kassi. Pour les uns, « le fils de la reine actuelle ne peut pas hériter du trône« , si l’on en croit le ministre-gouverneur du district de Yamoussoukro qui, chef de canton Akoué, est baptisé Nanan Boigny N’Dri III.
En revanche pour les autres, dont l’association des cadres et ressortissants de Sakassou, Nanan Akoua Boni II est disqualifiée.
D’une part, la reine Akoua Boni I, successeure de la reine Abla Pokou et deuxième au trône, aurait recommandé au peuple baoulé de ne plus mettre une femme sur le trône en raison des difficultés à respecter les rituels traditionnels d’adoration. D’autre part donc, la chaise royale, appelée Yassoua Bia, est un trône masculin en or massif. C’est une chaise de commandement qui doit être occupée par un homme et non une femme.
Car, le 22 février 2016, en pleines cérémonies funéraires, Nanan N’Goran Koffi II, chef du canton de Fahafoué, a présenté, au chef de l’État, Nanan Akoua Boni II comme la reine des Baoulé.
Et l’État a pris fait et cause pour la reine, malgré des vices de forme et de procédure, accusent les détracteurs. Nanan N’Goran Koffi II aurait transgressé les règles: il serait illégitime, car il ne serait pas un Djefoué, c’est-à-dire un garant de la protection du trône. De plus, ce n’est pas pendant les funérailles que l’on divulgue le nom du nouveau roi. La crise de la royauté baoulé s’est d’autant exacerbée que la lune de miel entre Alassane Ouattara, président du RHDP, et Henri Konan Bédié, président du PDCI-RDA, a pris fin, entraînant une âpre lutte politique pour le contrôle du peuple baoulé, au détriment des règles coutumières.
C’est également cette manœuvre pour aliéner l’institution royale à la solde de chapelles politiques, qui est à l’origine du blocage, chez les Abron ou Bron. Depuis le 10 août 1992, Nanan Koffi Yéboua, 16è roi, a tiré sa révérence. Et deux lignées, les Zanzan et les Yakassé, se disputent le trône.
Ici aussi, la politique est omniprésente. Appia 1er , que reconnaissait le pouvoir de Laurent Gbagbo, est soupçonné de militer au FPI. Et Adjemane, du même village que Kobenan Kouassi Adjoumani, ministre d’État et porte-parole du RHDP, est accusé de rouler pour le parti au pouvoir. Le 29 juillet 2015, dans le Zanzan, c’est lui qui a été présenté au président Ouattara, à sa visite d’État à Bondoukou.
by F. M. Bally