Les villages Atchans, pour le peu de terres qui leur restent, sont aujourd’hui confrontés aux prédateurs du foncier et de l’immobilier qui piétinent, à volonté, les Us et coutumes en place pour assouvir leurs besoins mercantiles. Dans cette veine, des cadres et natifs de certains villages sont utilisés et manipulés à souhait. C’est le cas du village d’Adjamé-Bingerville, confronté à une crise de chefferie qui ne semble émouvoir personne, attendant que le pire se produise d’abord.
Ensuite, la présentation publique est faite à la communauté villageoise en présence du chef de terre. Pour terminer, il s’en suit l’intronisation du nouveau chef par la personne exclusivement en charge de cette prérogative dans le village». Le choix de nanan Mobio Aboussou répond-il à cette démarche ? Bien avant de découvrir comment la désignation du chef Mobio Aboussou Guy Georges, il est important de montrer que la structure sociale chez les Atchan est basée sur le système de classe d’âge, notamment les générations d’habitants et les catégories. Une génération regroupe tous ceux qui sont nés dans un espace de temps de quinze ans au moins.
Ce sont les trois autres catégories en l’occurrence, les Dogba (puinés), les Agban (cadets) et les Assoukrou (benjamins) qui présentent deux candidats par catégorie pour le choix du chef. Les six noms sont alors déposés auprès des ainés de la catégorie que sont les Djéhou, qui à leur tour les remet aux anciens après avoir fait leur choix. Ce sont ces derniers qui, après consultations des mânes, confirment ou infirme le choix du chef du village.
C’est de cette façon que Mobio Aboussou Guy Georges issu de la catégorie Agban (cadets) a été désigné comme Chef du village d’Adjamé-Bingerville dans la nuit du 1er au 2 octobre 2020. L
Il a même offert de la boisson après la désignation de Mobio Aboussou Guy Georges, membre de sa catégorie. Le 20 mars 2021, le nouveau chef Mobio Aboussou Guy Georges est présenté officiellement à sa génération. Le 27 mars se déroule à la place publique la présentation publique du nouveau chef à la communauté villageoise, avant d’être consacré par le doyen du village le 10 avril 2021. Mobio Aboussou Guy Georges sera, pour terminer intronisé sur la place publique le 7 octobre 2021 par les anciens avec le Chef sortant (le chef de la génération GNANDO du nom d’ADEKE Joseph). En définitive, la désignation du nouveau chef d’Adjamé-Bingerville, Mobio Aboussou Guy Georges, a respecté toutes les étapes liées au processus de désignation du chef selon les us et coutumes Atchans.
«C’est le chef sortant qui a choisi Awaka et non les Tchagba» déclare Nanan AGA Djoman Albert, lors de la rencontre avec le Ministre KKB
Il est devenu le doyen des Gnandô-Dogba depuis 2000, après le décès de son ami Beugré Ngo Louis. Pour l’histoire du village, il rappelle que le peuple Ebrié était déjà là quand les colons ont fait leur apparition à Bingerville. Selon le patriarche, ce sont les membres de la génération Gnandô, qui sont venus délimiter le village. Son père issu de la génération Tchagba et qui fut le premier-né d’Awè Djèmin était encore dans le ventre de sa mère lorsque le village a été créé. Il expliquera par la suite, à propos de l’organisation politique du village, que depuis toujours et la nuit des temps, le chef du village est choisi parmi les trois catégories qui composent la génération, les Dogba, les Agban et les Assoukrou.
Le chef n’est jamais désigné par le chef sortant, comme cela s’est passé ici à Adjamé-Bingerville. A la question de savoir quel est, selon lui, l’origine de la crise qui secoue le village depuis plusieurs mois, en sa qualité substitut du doyen qui officie toutes les cérémonies du village, il pointera directement du doigt, l’ancien chef Agbo Honoré. «C’est le chef sortant, Agbo Honoré, qui a choisi Awaka, alors que longtemps avant, la génération avait déjà choisi Mobio Aboussou Guy Georges. Le choix d’Awaka n’est pas issu des us et coutumes ébrié en vigueur depuis la nuit des temps. Parce que ce n’est pas sa catégorie qui l’a choisi encore moins sa génération. Awaka sait comment le choix du chef est fait en pays Ebrié. Comment peut-il se prévaloir chef alors qu’il n’a pas été désigné par sa catégorie et sa génération», s’est-il indigné.
Le patriarche s’est par la suite appesanti sur l’arrêté préfectoral dont dispose Awaka. Selon lui, ce n’est pas un arrêté qui fait un chef mais plutôt les coutumes, d’abord. Celui-ci ne lui donne pas le droit de manipuler les biens du village notamment les terres. «Depuis qu’il a reçu son arrêté, il n’est pas venu le présenter aux doyens du village comme ça se passait les autres fois. Donc personne n’est informé de cet arrêté. S’ils sont entrain de vendre des terrains, le village n’est pas au courant. Quand la crise sera régulée, les populations iront faire oppositions à tous les actes posés par Awaka. Dans la loi coutumière, ce sont les anciens qui donnent leur accord avant qu’un chef du village ne vende un terrain», a tenu à préciser le patriarche.
C’est seulement le problème du choix du chef qui a engendré cette crise. Un chef sortant qui choisit son successeur, un jeune homme qui lui est proche. Je demande donc à Awaka d’arrêter ce qu’il fait» et de revenir à de meilleurs sentiments pour se mettre aux côtés de celui que les Tchagba ont choisi, je veux parler de Mobio Aboussou Guy Georges », a-t-il conclu.
KKB aux populations d’Adjamé Bingerville : «Je suis venu, mes deux yeux ont vu et ça me suffit»
Le Ministre de la Réconciliation nationale en Côte d’Ivoire Kouadio Konan Bertin (KKB) n’a pas manqué à l’appel de la journée de la vérité qui a eu lieu ce lundi 30 mai 2022 à Adjamé-Bingerville. Il était bel et bien présent à sa propre initiative avec une forte délégation malgré les tentatives de dissuasion pour son report, selon ses propres termes : «Je ne vous le cache pas, les gens m’ont dit, comme les autres ne sont pas là, il faut dire qu’on t’a appelé à la présidence. J’ai dit NON».
Le Ministre de la réconciliation nationale et de la cohésion sociale s’est dit très préoccupé par le climat délétère qui règne sur le village d’Adjamé-Bingerville, suite à des images insupportables d’un enterrement découvertes sur les réseaux sociaux. «Un jour, je regardais les réseaux sociaux, à la faveur d’un enterrement et je vois un corps d’Ebrié nu dans une tombe…il n’y a pas plus grande humiliation qu’on puisse infliger au peuple Ebrié dans ses valeurs traditionnelles que ce que moi j’ai vu», a regretté le ministre.
«Vous qui m’avez respecté, vous qui êtes venus, je vous salue et je vous remercie de m’avoir respecté et d’être venus. En venant ici, vous m’avez respecté, c’est vrai, mais vous avez respecté le président Alassane Ouattara qui a signé un décret qui fait de moi Ministre. Puisque, si vous voulez qu’on se respecte tous à la chaine, il faut commencer par donner le bon exemple. Et donc, les doyens, je parle sous votre contrôle, ça ne sert à rien qu’on parle et parle aujourd’hui. Mais ce que je peux donc retenir et vous dire, je suis venu, mes deux yeux ont vu et ça me suffit. Et je vais donc me retirer, je ne vous cache pas, je vais encore appeler Awaka, on va se parler parce que quel que soit le groupe qui va avoir le dessus, vous êtes appelés à vivre ensemble », a conclu le ministre.
A SUIVRE…
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par L. Saki