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Côte d’Ivoire :«La privatisation des CHU ne doit pas effrayer l’opinion», Douglas Mountain- vers la fin des dysfonctionnements des monstres bureaucratiques non maîtrisés

Côte d'Ivoire :«La privatisation des CHU ne doit pas effrayer l’opinion» Douglas Mountain- vers la fin des dysfonctionnements des monstres bureaucratiques non maîtrisés LEDEBATIVOIRIEN.NET

    Les CHU sont pourtant en situation de monopole, sur un marché en forte croissance en Côte d’Ivoire. Mais  pourquoi n’ont-ils impact sur l’économie ivoirienne ? Déléguer l’exploitation des CHU au privé. Voilà qui est dit ! «Si la réforme est pleinement mise en œuvre, elle va de facto instaurer une concurrence frontale avec les structures privées.

Une ‘’bataille de l’image’’ qui va se traduire par une course à la qualité de service et à l’innovation sera inévitablement engagés dans les CHU…», expose  clairement ici, Douglas Mountain, avec Le Cercle des Réflexions Libérales. Suivez avec ledebativoirien, le mérite de la voie de la privatisation: «Une démarche de bon sens qui reste incontournable».

 Pourquoi ne pas tenter la privatisations des CHU, des monstres bureaucratiques que personne ne semble réellement maîtriser.

«Dans le dernier trimestre l’année 1993, une réforme fut mise en œuvre  par l’actuel Président, alors Premier Ministre. Les CHU étaient devenus des Etablissements Publics à caractère Industriel et Commercial (EPIC). Ainsi ils devaient assumer toutes leurs charges, y compris le personnel.  Ils sortaient ainsi du portefeuille comptable de l’Etat.

S’en était suivi une grève, car les directions n’arrivaient pas à faire face aux charges salariales du premier mois qui a suivi la réforme, ce qui est compréhensible pour une telle réforme. C’est dans ces circonstances qu’est intervenu le décès du Président Houphouët-Boigny, en pleine grève des CHU. Le nouveau pouvoir soucieux d’obtenir la paix sociale, a rapidement annulé la réforme.

Pourtant elle était pertinente. Ayant désormais leur destin comptable entre leurs mains, les CHU auraient été contraints à une gestion différente. Ces établissements  auraient été obligés de se préoccuper de la démarche qualité, ce qui n’a jamais été le cas. Les CHU auraient mis tout en œuvre pour effacer cette image de  » mouroir  » qui leur est associée.

En 2018, soit 25 ans après la première tentative, l’Etat met  de nouveau cette réforme sur la table parce qu’elle reste incontournable. La privatisation ou la transformation des CHU en EPIC est une option qui ne doit pas effrayer l’opinion.  Elle se traduira par une amélioration de la qualité des soins, couplée à une orientation à la baisse des prix, contrairement à ce que l’on pense. Elle donnera aussi un coup d’accélérateur à l’ensemble des activités relevant du secteur de la santé.

Les vertus de la réforme : La bataille  de l’image et de la qualité de service

En environnement concurrentiel, l’image fait partie intégrante du produit qui est proposé. L’opinion a toujours eu une image négative  de nos CHU dans l’ensemble. Dans le cadre de cette réforme, progressivement  va s’opérer une différenciation, les CHU  n’auront pas la même image auprès de la population, ce qui va influer sur  leur  fréquentation et donc sur leur rentabilité.

Nos CHU seront inévitablement engagés dans une ‘’bataille de l’image’’ qui va se traduire par une course à la qualité de service et à l’innovation. Les CHU vont devoir se préoccuper de la démarche qualité pour améliorer leur image en vue de capter et fidéliser la clientèle, ce qui n’a jamais été le cas à ce jour.

Les injures du personnel, les malades qui dorment à même le sol, les accidentés laissés pour compte, les interminables examens, la vétusté des locaux, le délabrement des services, etc…sont des éléments qui ont longtemps abîmé l’image des CHU, et qui sont amenés à disparaître  dans le cadre de la bataille de l’image et de la qualité de service. Ce sont des changements que la population sera amenée à constater assez rapidement.

Efficacité et  réduction des coûts dans nos CHU

Si la réforme est pleinement mise en œuvre, elle va de facto instaurer une concurrence frontale entre les CHU, et une concurrence encore plus prononcée avec les structures privées. Dans un tel environnement, la course à la rentabilité se traduit  d’abord par une course à  la réduction des coûts. Les CHU seront dans l’obligation de s’organiser pour réduire leurs coûts  afin d’être compétitifs.

Les dysfonctionnements tels que les disparitions des stocks de médicaments, des malades hospitalisés qui ne figurent pas dans les registres, les infirmiers  qui reçoivent les paiements au détriment des caisses, l’absence du personnel au profit des cliniques, les malades qui sont dirigés vers ces cliniques,  le désordre ambiant, la «guerre»  entre les différents services …etc…etc…seront traités par des dispositions d’organisation. L’exigence de rentabilité ne laissera pas d’autres choix aux directions des CHU que de prendre des mesures d’assainissement et d’efficacité. Chaque direction va jouer sa survie sur son organisation.

L’inquiétude sur les futurs prix

La question des prix est au centre des inquiétudes, ce qui est légitime.  Beaucoup pensent que les tarifs vont croître si les CHU sont acculés à la rentabilité.  Mais il faut savoir une chose, un environnement pleinement concurrentiel empêche toujours toute hausse unilatérale  des prix, quel que soit le secteur d’activité. C’est sur la qualité, l’innovation et les coûts que jouent les acteurs.  Les CHU assurent une production marchande dans le cadre d’une mission de service public. Ils sont supposés pratiquer des prix subventionnés. Mais dans les faits,  cela ne garantit pas toujours des tarifs «sociaux».

Car les médecins prescrivent  une liste interminable  d’examens, de tests, et d’ordonnances, programment plusieurs interventions chirurgicales là où une seule suffit, prolongent indéfiniment les hospitalisations, tout est à leur appréciation. Au final le tarif n’a rien de «social». Les prix se rapprochent de ceux des officines privées. Malgré cela, nos CHU sont en déficit d’exploitation chronique. Qu’est ce qui ne marche pas ? Faut-il continuellement les renflouer ? Ni l’Etat, ni les populations ne sortent gagnants de la situation actuelle.  Pourquoi ne pas essayer une autre formule ? Pourquoi ne pas tenter la privatisation ?

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Les CHU sont en situation de monopole, sur un marché en forte croissance, on a tendance à l’oublier. Ce sont les établissements qui reçoivent le plus de malades, et qui ont le plus de recettes. Cela leur garantit suffisamment de marges pour maintenir et même  baisser les prix  sans compromettre les résultats. Nos CHU s’adressent à la masse. Donc les prix ne pourront être que des prix de masse, donc des prix bas.

Ainsi cette peur de la hausse des prix qui pourrait intervenir est injustifiée.  C’est bien le contraire qui se produira, une amélioration de la qualité des soins et des prix orientés à la baisse. A ce jour, cela ne s’est pas encore produit du fait de  ce  problème de gouvernance propre aux établissements étatiques. La réforme doit corriger cet aspect. La privatisation reste et demeure une arme pleinement efficace contre la corruption.

L’impact des CHU sur l’économie ivoirienne

Avec leur taille, leur volume d’activité, les investissements qu’ils nécessitent, le volume du personnel,  et les recettes qu’ils génèrent, les CHU sont des structures majeures autour desquelles gravite une galaxie de fournisseurs et de sous-traitants. Leur gigantisme est un élément devant leur permettre d’être des pools de croissance, des moteurs pour l’économie ivoirienne à l’instar de ce qui se passe au Maroc où un secteur de santé performant, imprime du mouvement à toute l’économie.

Cette prédiction ne se réalisera jamais en Côte d’Ivoire dans la configuration actuelle. Les CHU doivent sortir du portefeuille comptable de l’Etat, afin que la mue puisse s’opérer. Il ne faut pas voir les CHU seulement comme des hôpitaux, mais aussi et surtout  comme des entreprises de grande taille capables  d’impulser une dynamique à toute l’économie. D’autre part, le secteur de la santé est très impacté par les nouvelles technologies. Cela suppose une réactivité dans l’acquisition des équipements. Dans nos CHU aujourd’hui, bien des équipements ne fonctionnent plus. Et cela n’émeut personne.  Une situation qui ne pourra simplement pas se produire en cas d’exploitation privée, car cela signifierait à coup sûr une perte de clientèle.

Déléguer l’exploitation des CHU au privé : une démarche de bon sens qui reste incontournable

A l’instar de  la PISAM qui  contracte régulièrement  des emprunts  obligataires importants  pour financer son expansion, il n’y a pas de raison que les CHU, qui ont une activité et des recettes supérieures ne puissent faire de même. La réforme doit libérer les énergies et l’innovation. Plus que jamais nos CHU ont aujourd’hui la capacité de prendre leur destin comptable en mains, faire face à toutes leurs charges (y compris le personnel),

dégager des excédents et financer leur expansion à l’instar de la SOTRA, du  BNETD, des  Ports,  de la RTI, la Poste etc…qui bien que propriété de l’Etat, sont devenues des structures autonomes et performantes sans que l’Etat n’y injecte le moindre sous.

D’ailleurs le  nouveau CHU d’Angré est sous un schéma d’exploitation différent de celui des trois autres. Toute une série de partenariats avec des structures privées assurent son fonctionnement. Le personnel a signé des ’’contrats de performance’’, ce qui signifie qu’il peut être libéré si les résultats ne sont pas atteints. Les différents chefs de services ne sont pas des universitaires mais des gestionnaires et des financiers venant du privé.

Pour le futur CHU d’Abobo, il faudra aller encore plus loin. On pourra s’inspirer du schéma déjà en œuvre en Côte d’Ivoire avec les formations de santé urbaine communautaires, les FSU-COM. Il faudra reproduire le modèle à une échelle supérieure.

Le gouvernement ivoirien a aussi la possibilité d’initier l’approche graduelle qui consiste à privatiser dans un premier temps un seul CHU et faire le bilan de l’opération au bout de trois ou quatre ans.  Des constats très clairs pourront ainsi être faits et trancher le débat», expose Douglas Mountain,  Le Cercle des Réflexions Libérales.

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