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Côte d’Ivoire: depuis  un an, un prisonnier appelle la clémence du Président Ouattara et de la présidente Chantal CAMARA  (dossier)

 

Présenté comme SAWADOGO PHILIPPE, il est condamné à 20 ans de prison fermes, depuis 2011. Il en a  purgé 11 en  2022. Il pense avoir pris conscience de son acte. Voici ce qu’il continue de demander  au Président de la république ivoirien Alassane Ouattara et à sa victime, la juge Chantal Camara. Décembre 2022 : «Monsieur  le  journaliste, grand frère, ne nous laissez pas tomber». Octobre 2021, la rédaction de ledebativoirien.net est contactée. C’est un détenu.

      Il le fait par une personne interposée, sous le sceau de l’anonymat, puisque les échanges ont duré plusieurs jours, voire semaines, avant  la mise sous  presse. Il le fait de Dimbokro, c’est là qu’il  purge sa peine. Il n’est plus à la MACA-Maison d’arrêt et de correction d’Abidjan. Les faits s’étant produits à Abidjan, en  2011, il souhaite un relais pour demander ‘‘la clémence’’ de la nation, donc  du Président de la République.

Il y a un an déjà ledebativoirien lui prêtait attention. Décembre 2022, il renouvelle sa demande auprès de la rédaction à l’effet d’en faire écho  auprès du chef de l’Etat.

 

Retour sur les  regrets d’un détenu

Il a été condamné à 20 ans fermes, en 2011. Il a  participé à un vol de nuit. Il a purgé déjà 11 ans en  2022. Il lui reste 9 ans encore à s’assoir sur la natte de sa cellule de Dimbokro,  ou ailleurs. Il n’en peut plus ! Regrettant les faits qui suivent, il appelle, à ‘‘La Grâce Présidentielle’’ (article 134 du code pénal  ivoirien) qui dit: «La grâce accordée par décret du Président de la République est la dispense, totale ou partielle, définitive ou conditionnelle d’exécution d’une peine ou mesure de sûreté devenue définitive, à l’exception de l’internement dans une maison de santé et de la confiscation spéciale. Le décret de grâce peut commuer toute peine en une peine moins élevée dans l’échelle légale des peines».

La victime du détenu n’est autre que la présidente de la Cour de  Cassation, Madame la juge  Chantal Camara. «En 2015 le Président de la République avait fait des remises de  peines de  4 ans, pour ceux qui sont condamnés  à 20 ans. Nous n’avons  pas pu en bénéficier. Il l’a fait deux fois. Moi, mes 10 ans, j’ai les ai fait à sec. C’est Dieu qui m’a aidé à faire mes peines…Aujourd’hui, je passe par vous monsieur grâce  à une connaissance, pour  que vous m’aidiez à demander pardon  à  la victime. La victime dit qu’elle a été violentée, brutalisée, mais pas de viol ou d’agression sexuelle, non, non. La victime s’appelle madame CAMARA CHANTAL, présidente de la Cour de cassation d’Abidjan », commence-t-il.

 

Que s’est-il passé cette nuit de 2011?

Voici l’histoire comme le détenu de Dimbokro l’a confiée, sur  plusieurs  jours par personne interposée à ledebativoirien.net…!

«Je me présente. Je suis SAWADOGO PHILIPPE. J’ai 42 ans, aujourd’hui 43  en 2022. Je suis détenu depuis le 19 août 2011 pour vol en réunion à mains armées avec violence. Je suis condamné à 20 ans de prison. Père de deux enfants. Une fille de 17 ans et un garçon de 17 ans. Aujourd’hui ils  ont 18  ans et cela me fait 11 ans six mois que je suis en détention. Ça fait plusieurs années  que mes enfants ne savent pas où se trouve leur papa.

Je n’ai aucune famille sur le territoire ivoirien. Toute ma famille se trouve au Burkina Faso. Je reconnais avoir fait des choses trop graves. Je vous demande beaucoup PARDON, papa ADO au nom de Dieu.  Après quelques années passées dans cette détention, cela m’a fait prendre conscience. Je souhaite que vous m’accordiez une seconde chance. Je n’ai pas bénéficié des remises de peine de 8 ans quelques années. Le président à fait, en 2015, une remise de peine». confie-t-il. Puis, il poursuit son récit :

«Voici un peu, ce que je suis. Vous pouvez me poser toutes les questions que vous souhaitez poser. Je vous répondrai avec plaisir. Merci de m’écouter et sauver des âmes perdues. Que DIEU vous donne longue Vie et qu’il vous bénisse. Je ne dis pas ces mots pour vous faire plaisir ou parce que vous voulez m’aider. Je le dis parce que c’est la vérité. Je sais de quoi je parle. J’ai vu beaucoup de choses et je continue de voir encore. Excusez-moi pour le dérangement. Merci infiniment d’accepter de m’aider monsieur le journaliste».

 

A-t-il été induit en erreur? Y-a-t-il une situation qui l’a obligé à agir?

Le détenu Sawadogo Philippe: «Oui j’ai été induit en erreur. Oui, il y a eu une situation qui m’a obligé à agir ainsi. J’étais avec un ami chez qui je vivais à Abidjan. C’était en 2011, pendant la crise postélectorale. Je ne travaillais pas, et je n’avais rien comme argent. Je voulais me retourner pour aller en famille. Allez à Bouaké récupérer mes enfants et les ramener chez mes parents au Burkina Faso.

On dormait au marché, sur les tables, parce qu’il n’arrêtait pas de pleuvoir des balles dans le quartier. Ça tuait beaucoup dans le quartier. Il y avait les règlements de compte. Je voulais à tout prix quitter Abidjan. Je sais que, ce n’est pas une raison pour que j’agisse ainsi, mais je ne savais pas comment faire pour retourner en famille avec mes enfants. Je voulais même partir à la cathédrale Saint Paul au Plateau pour demander de l’aide. Mais je ne pouvais pas, parce que connaissait pas le chemin. Je suis arrivé à Abidjan y a pas longtemps ».

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Il poursuit les faits

 ««J’étais avec un ami Abidjan, c’était pendant la crise de  2011. Mon ami avait son frère qui travaillait avec une dame. Un soir, il est venu voir mon ami pour lui dire qu’il y a de l’argent quelque part dans la maison de  madame où il travaille. Donc il veut qu’on parte prendre. C’est ainsi que nous sommes allés là-bas.

C’est la faim et la peur de mourir qui m’ont poussé à le faire. On dormait dehors, parce qu’il pleuvait des balles dans le quartier. Ça tuait aussi dans le désordre. Il y avait les règlements de comptes entre les gens. Il fallait être présent pour croire. On ne trouvait même pas à manger à plus forte raison l’argent pour payer transport. J’ai deux enfants et ils ne savent même pas où je suis. Toute ma famille est au Burkina Faso. Je ne savais où aller et comment faire pour avoir l’argent? ».

Ce jour-là, on est parti à 4 personnes. Avant qu’on ne parte là-bas, on muri une idée. On a donné des comprimés somnifères pour faire endormir les gendarmes qui la surveillaient la victime. Chose que le garçon de ménage a fait. Quand nous sommes arrivés, les gendarmes dormaient déjà. On a poussé le portail et on est rentré moi et mon ami, nous sommes restés au rez-de-chaussée et deux autres sont montés au balcon. Quelques minutes plus tard, ils sont redescendus et nous sommes repartis. Je ne peux pas vous dire ce qui s’est passé là-haut, parce que je ne suis pas monté ».

Il revient  au procès

«Le garçon de ménage a dit à la dame que c’était le frère de DAVID qui a commandité le braquage. Il se trouve que le nommé David a soupçonné que son complice allait craquer, donc lui, il a pris la fuite.  Donc les FRCI ont commencé à faire des recherches et des renseignements. Mon ami avait un frère Togolais, c’est ce dernier qui a dit aux FRCI de m’arrêter comme quoi, je savais où se trouvait mon complice qui est en même temps son propre  frère.  C’est comme cela, ils m’ont arrêté. C’est le frère de mon complice qui nous a dénoncés.

C’est comme cela qu’on a été arrêtés et déférés à la MACA, le 19/08/2011. Le jour de la mort de Yacou le Chinois. Les gardes pénitenciers ont déporté mon complice au camp pénal de Bouaké, quelques semaines plus tard, ils m’ont déporté à la prison de Dimbokro. C’est comme cela que je me suis retrouvé à Dimbokro, aujourd’hui ». Une  pause. Reprise plus tard.

 

Que sont devenus les autres complices ?

Le détenu : «Nous étions 8 personnes à avoir préparé le coup. David et N’dri Bekanty Joël, sont les garçons de ménage de la victime. Combaté Laré et Moi sommes amis. Douty Roger est le petit frère de Combaté Laré et Jean leur frère. Il y a deux autres Ahiwa Pierre et  Djoroko. Mais ces deux derniers ont été tués quelques  jours, suite un braquage, après notre forfait.

N’dri Bekanty Joël, Combaté Laré, Douty Roger, Jean et Moi, avons été arrêtés. David s’est enfuit, lorsqu’il a su que N’dri Bekanty Joël l’a dénoncé. Nous sommes restés 5  à avoir été placés en garde  à vue. Jean et Douty Roger n’ont pas participé au fait. Nous avons dit au juge qu’ils n’ont pas participé. Ils ont été libérés, quelques mois après. N’dri Bekanty Joël, Combaté Laré et moi-même avons été condamnés à 20 ans de prison».

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Le détenu : «Il n’y a pas eu de mort. Combaté Laré  et Moi sommes restés au rez-de-chaussée en train de surveiller les 2 gendarmes qui assuraient la sécurité de la maison. Ils étaient tous deux endormis. On les avait drogués avec des comprimés que les 2 garçons de maison ont mis dans leur nourriture. Donc, il n’y a pas eu de violence. «Chacun a eu 1.200.000 mille francs. Mais, nous avons su, après qui était la victime. Elle nous a fait payer très cher notre acte», explique-t-il.

Sa demande de clémence

Le détenu : « Je n’ai pas eu de charges personnelles  contre moi à part celles qui pèse sur le groupe. Quand on a été arrêtés et conduits en prison en 2011, en 2015 le présidant a fait une réduction de peine de 4 ans pour tous les prisonniers qui sont condamnés à de lourde peine. Tous les prisonniers ont bénéficié sauf nous. Et cela a été fait 2 fois et nous rien ! On ne sait pas ce qui s’est passé et puis nous autres n’avion pas bénéficié.  Ça fait bientôt 11 ans 3 mois que je suis en prison », confie-t-il à l’émissaire  de transmettre à la rédaction de  ledebativoirien.net:

«Je voudrais par votre action dire au Président de la République, le papa de la nation, au ministre de la justice, au ministre de la réconciliation, que je souhaite vraiment que la société m’accorde une seconde chance. Je veux retrouver mes enfants et aller à Gueyo pour m’occuper de la plantation de mon père et pouvoir prendre soins de mes parents et de mes enfants.

Je peux mentir pour dit que j’ai changé pour obtenir votre pardon, mais je sais ce que j’ai enduré et vécu durant ces années. Ce n’est pas quelqu’un qui va dire que ce que j’ai fait n’est pas bon. Je sais, maintenant ce qui est bon et ce qui ne l’est pas…», nous laisse-t-il comme l’un de ses derniers échanges.

 

Son  message pour le Chef de  l’Etat  

« Bonjour papa, monsieur le Président de  la République. Je me nomme SAWADOGO PHILIPPE, je suis détenu depuis le 19/08/11 à la prison civile d’Abidjan, puis transféré à la prison de Dimbokro, pour vol en réunion à main armée, avec violence. J’ai été condamné à une peine de 20 ans. Je reconnais en toute sincérité que ce que j’ai fait n’est pas bon. Je suis père de deux enfants qui sont âgé de 18ans aujourd’hui.

Je n’ai aucune famille en Côte d’ivoire. Je vous demande pardon. Cela fait 11 ans 3 mois que je suis en prison. Nous n’avons pas bénéficié des réductions de peine de 4 ans que vous aviez accordé à 2 reprises en 2015. Je ne veux plus mentir encore. Je demande pardon parce que j’ai pris conscience des choses que j’ai faites. Qui ne sont pas bonnes. Moi seul sais, ce que j’ai enduré pendant ces 11 ans. C’est moi qui vais, aujourd’hui donner conseil à d’autres personnes qui voudront suivre mon chemin, de ce qui va leur arriver. Si jamais ils font ce qui n’est pas bon.

Je vous demande de m’accorder une seconde chance pour que je puisse m’occuper de mes enfants et mes parents qui sont à un âge très avancé. Je vous demande d’avoir pitié de nous, nous sommes aux nombre de 3 en détention à ce  jour. Sawadogo Philippe, moi, à Dimbokro, N’dri Bekanty Joël à la Maca, Kombaté Laré au camp pénal de Bouaké.

Après avoir passé autant de temps en prison, j’ai pris conscience de la gravité de l’action que j’ai posée. Je demande  pardon  à maman Chantal Camara, pour ce qu’elle a pu subir, par notre fait. Je regrette, je lui demande clémence. Je sais que j’ai payé. Je regrette et je ne conseillerai jamais quelqu’un à faire du mal à son prochain. Pardon Maman. Pardon papa…» terminet-il.

En décembre  2022 le message du détenu repenti sera-t-il entendu par le Président de la République en cette fin d’année porteuse de la ‘‘ Grâce Présidentielle ? Sawadogo Philippe va croiser  les doigts, depuis son lieu de détention, Dimbokro. Les autres complices, aussi,  à Bouaké et Abidjan.

Ledebativoirien.net

Par HERVE MAKRE

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