ALIBHAÏ -La Mairie veut devenir patron d’une parcelle avec la Bourse de Vivrier de Côte d’Ivoire
ALIBHAÏ !Une entorse qui démarre sous la Refondation et que veut achever le RHDP à Yopougon? Des employés de l’Etat ont-ils le droit de piétiner des décisions de la justice rendue par la République de Côte d’Ivoire ? Ont-ils le droit de ne pas exécuter des instructions de leur hiérarchie fondées par des décisions de Justice ?
La mairie de Yopougon peut-elle devenir maitresse de la parcelle d’un citoyen ? Autant d’interrogations qui présentent la réalité du triptyque justice-administration et exécutif en terre ivoirienne. LE DEBAT IVOIRIEN vous plonge ou replonge pour certains, dans les méandres de la fortune d’un opérateur économique face au monstre dévastateur. (ACTE 1)
C’est l’histoire de la parcelle devant abriter la Construction du Marché de Démi-Gros et de Détails de Gesco-Manutention Yopougon, salué de tous. Une situation qui interpelle sur les pratiques administratives en conflit et en violation sans masque de décisions de Justice. Ce projet baptisé aussi «Projet Bourse de Vivrier de Côte d’Ivoire» a le soutien de la BNI (Banque nationale d’investissement), avec un prêt de 4 milliards FCFA pour finaliser le financement de la quote-part de la commune. Un projet d’une valeur dite globale de 24 milliards FCFA qui bénéficiera à termes, d’un financement de l’AFD (Agence Française de Développement) à hauteur de 20 milliards FCFA. On applaudit. Sauf que les victimes dudit projet tambourinent les portes du temple de Thémis. Au nombre desquelles, une qui revendique des droits sur la parcelle que lorgne la Mairie de Yopougon.
Allons à Gesco-Dabou
Des ouvriers sur le site sont au travail. Sous la supervision du chef chantier de la société qui entreprend les travaux. C’est un chantier sur lequel des installations de conteneurs de bureaux sont bien présents. La Société y active est la TGCC Côte d’Ivoire. Avec pour spécificités : la passation de tous contrats relatifs aux opérations d‘aménagement, de lotissement et de construction, de rénovation et d’entretien de bâtiments.
Mais qu’est-ce qui se cache derrière ces cigle TGCC ? Simplement : Travaux Généraux de Construction de Casablanca, donc Marocaine. Ne dites pas, la baie lagunaire ! «Notre société a été mandatée par la Mairie de Yopougon pour la construction d’un marché. Pour plus de renseignements, adressez-vous à la Mairie. Les visites ne sont pas autorisées sur le chantier…», rassure le chef du chantier un certain J. Jusque-là rien d’anormal. N’est-ce pas ! Poursuivons donc.
Histoire d’un braquage
En Côte d’Ivoire, la gestion des terres commence réellement avec l’Arrêté N°2164, du 9 juillet 1936 modifié par l’arrêté N° 86 du 31 janvier 1938, (espace ou temps colonial), réglementant l’aliénation des terrains domaniaux. L’histoire de la parcelle du projet de marché de gros qui nous intéresse commence en 1967.
Cette année-là, le ministère de l’Agriculture agissant pour le compte de l’Etat de Côte d’Ivoire, par arrêté N° 346/ AGRI/ DOM, du 27 mars 1967 accorde à la société ANADOR, la concession provisoire avec bail emphytéotique, d’un terrain rural de 16 ha 56a 74 ca. Faisant objet de titre foncier N°11733 et N°11734 de la circonscription de foncière de Bingerville pour une durée de 25 ans. Six (6) ans plus tard, la société ANADOR,
par acte notarié en date du 23 août 1973 cède le bénéfice de son bail emphytéotique à la société «Domaine de Niangon». Quinze (15) ans plus tard, soit en 1988, par acte de transmission de droit de concessionnaire en date du 11 février 1988, la société «Domaine de Niangon», transmettait au profit de monsieur Abdoulaziz Ahmed ALIBHAÏ, le bénéfice de son bail emphytéotique en ce qui concerne le Titre Foncier N°1173 d’une contenance 8ha 82a 35ca. Jusque-là tout se passe bien pour l’heureux attributaire.
Selon les textes Domaniaux, il peut être valable pour au moins 18 ans à 99 ans et ne bénéficie pas d’une tacite reconduction. Il faut en faire une demande de renouvellement. C’est tout naturellement que le nouvel acquéreur qui ne jouit à peine du terrain introduise une demande en 1993 pour normaliser la situation de ladite parcelle. C’est l’administration, ici qui va apprécier selon que l’on penche de tel ou tel coté ou dans telle direction.
Ainsi, le 9 janvier 1993, Abdoulaziz Ahmed ALIBHAÏ sollicite auprès du ministère de l’agriculture (alors tenu par Lambert Kouassi Konan (PDCI, de 1990-1999), signataire de l’acte du bail emphytéotique d’origine), le renouvellement de son bail.
Le ministre de l’Agriculture se déclare incompétent au motif que, désormais la parcelle susvisée est du domaine du ministère de la Construction et de l’urbanisme. Il prendra le soin contrairement à ce que veut l’usage en cours dans l’Administration ivoirienne, de ne pas transmettre le dossier du terrain au ministère concerné. Cependant, le ministère se garde le privilège d’attendre, le 13 septembre 1993 pour inviter le requérant à le faire lui-même.
Ainsi, Abdoulaziz Ahmed ALIBHAÏ, conformément aux instructions reçues du ministre Lambert Kouassi Konan, fait parvenir, le 18 novembre 1993 au ministère de la Construction et de l’urbanisme tenu par Marcel Amon Tanoh, (à l’époque des faits, PDCI) une autre demande de renouvellement du bail.
Un long silence va alors frapper sa demande. Coutume administrative en Côte d’Ivoire. Il décide, alors de rappeler par trois reprises sa demande au Ministre, le 27 mars, 27 avril et le 18 juin 1998. Le coup d’Etat de 1999 passe par là. En 2000, un nouveau régime s’installe. C’est celui de la Refondation. Abdoulaziz Ahmed ALIBHAÏ, peut espérer se dit-il. Il sera refroidi. C’est que contre toute attente, le ministère de la Construction tenu par Abouo Ndori Raymond rejette par lettre en date du 12 février 2001, la demande de renouvellement du bail emphytéotique. Raison! D’une part, qu’aucune clause et condition n’ont été respectées, notamment en ce qui concerne le renouvellement du bail, et d’autre part, que la parcelle concernée fait partie des terres du village Niangon Adjamé.
Face à cette nouvelle situation, Abdoulaziz Ahmed ALIBHAÏ décide de saisir la Chambre Administrative de la Cour suprême compétente en la matière, le 6 décembre 2001 en vue de voir annuler cette décision du ministère de la Construction. Ce qui va plaire, c’est que dans l’intervalle, en 2004, le ministère de la Construction et de l’urbanisme, par arrêté n°02045/MCUH/DU/SDAF approuve un plan de morcellement du terrain TF 11734 et TF 11733, morcellement du Yopougon Gesco manutention du 1er septembre 2003, le déclarant même d’utilité publique, alors qu’un procès est ouvert devant la plus haute juridiction du pays. Les professeurs au pouvoir en Côte d’Ivoire font leur jeu et mènent la danse selon leur désir !
La Cour Suprême monte au créneau 2006 !
Qu’il convient en effet, de faire observer que le 9 janvier 1993, plus d’1 an avant l’expiration du bail, prévu pour 12 janvier 1994, conformément aux stipulations du contrat le requérant Abdoulaziz Ahmed ALIBHAÏ, a adressé sa demande de renouvellement du bail au ministre de l’Agriculture, Autorité concédant, qui, au lieu de la transmettre directement au ministre de la Construction et de l’urbanisme chargé désormais de la gestion du terrain concerné, selon les usages en cours dans l’administration a attendu jusqu’au 13 septembre 1993, avant d’inviter le requérant à le faire ;
Considérant d’autre part, que le second motif tiré des affirmations selon lesquelles, la parcelle du terrain en cause fait partie de terres du village Niangon Adjamé est erroné ; qu’il résulte des pièces du dossier que la parcelle litigieuse, objet du titre foncier 11734 de la circonscription foncière de Bingerville est, immatriculée au nom de l’Etat. Considérant en conséquence, que le Ministère de la Construction et de l’Urbanisme s’est, dans ces conditions fondé sur des faits matériellement inexacts et dont la preuve n’est pas rapportée ;
Qu’il a en conséquence commis un abus de pouvoir. Qu’il convient dès lors d’annuler la décision entreprise». Doit-on être inquiet dans un Etat de droit respectant la Justice ? En clair, voici ce que dit le dispositif de l’arrêt N° 43 du 29 novembre 2006 de la Cour Suprême. Dispositif de la Cour Suprême. décide :
Article 1er :«L’intervention de la société dénommée «Projet Bourse de Vivrier de Côte d’Ivoire», est irrecevable.
Article2 : la requête en annulation présenté par Abdoulaziz Ahmed ALIBHAÏ, est recevable et fondée Article 3 : la décision du ministre de la Construction et de l’Urbanisme en date du 21 février 2001 est annulée. Ainsi jugé et prononcé par la Cour suprême, Chambre Administrative, en son audience publique ordinaire du 29 novembre 2006. »
En clair, ne transparaît-il pas déjà en 2006, à travers la décision de la Cour Suprême que le projet actuellement en cours en 2023 à la Gesco est jugé irrecevable ? L’arrêt de la Cour Suprême a été notifié à toutes les parties. Abdoulaziz Ahmed ALIBHAÏ, s’en était réjoui. l’Administration face aux décisions de justice Le 2 mars 2007, à la suite de cette décision, le Ministre de la Construction, de l’Urbanisme et de l’Habitat Marcel Amon Tanoh instruit, le Directeur des Affaires Juridiques et du contentieux, actuel ministre de la Justice et des droits de l’homme monsieur Sansan Kambilé, par l’arrêté n°07-005 /MCUH/DAJC en date du 7 mars 2007 de procéder à l’annulation de l’arrêté n°02045/MCUH/DU/SDAF, du 19 mars 2004 portant approbation du morcellement (du terrain TF 11734), morcellement du Yopougon Gesco Manutention (commune de Yopougon) district d’Abidjan.
Voici les termes suivants employés: Article 1er : «En application de l’Arrêt n°43 de la Chambre Administrative de la Cour Suprême en date, du 26 novembre 2006 annulant la décision de monsieur le ministre de la construction, de l’urbanisme et de l’habitat en date du 21 février 2001, rejetant la demande de renouvellement du bail emphytéotique introduite par Abdoulaziz Ahmed ALIBHAÏ, l’arrêté n°02045/MCUH/DU/SDAF portant approbation du morcellement du terrain TF 11734), morcellement du Yopougon Gesco Manutention est annulé.
C’est-à-dire, le morcellement du 19 mars 2004, et le refus du renouvellement du bail à ALIBHAÏ, formulé le du 21 févier 2001. Ainsi, instruction sera alors donnée au Directeur de l’Urbanisme et au Directeur du Domaine Urbain pour l’exécution des dispositions de l‘arrêté. Le 7 mars 2007, soit quelques mois après l’arrêt de la Cour Suprême de novembre 2006, le Directeur des Affaires Juridiques et du contentieux par courrier sollicite directement le Directeur du Domain sur instruction du ministre de la Construction et de l’Urbanisme, pour le renouvellement du bail de monsieur Abdoulaziz Ahmed ALIBHAÏ.
C’est qu’il était respectueux de la justice ! voici ce que l’actuel ministre de la justice en 2023 écrivait déjà en 2007 Courrier de la Direction des Affaires Juridiques et du contentieux du Ministère de la Construction, de l’Urbanisme et de l’Habitat, adressé à la Direction de la DDU, le 7 mars et réceptionné le 9 mars 2007. « Objet : renouvellement du bail, Par exploit de Maitre Nguessan Konan, huissier de justice à Abidjan, monsieur Abdoulaziz Ahmed ALIBHAÏ a signifié au ministre de la Construction, de l’Urbanisme et de l’Habitat l’Arrêt N° 43 rendu le 29 novembre 2006 par la Chambre administrative de la Cour Suprême prononçant pour excès de pouvoir de la décision ministérielle, du 21 février 2001,
Il m’a instruit par la même occasion de vous adresser une correspondance à l’effet de préparer l’acte de renouvellement du bail emphytéotique dont monsieur Abdoulaziz Ahmed ALIBHAÏ est bénéficiaire. Je m’empresse de faire connaitre que l’arrêté de morcellement susdit portait sur le site pour lequel le susmentionné a obtenu a obtenu le bail de l’espèce. Aussi, en exécution des décisions de monsieur le ministre, ai-je l’honneur de vous prier de bien vouloir procéder à l’établissement de l’acte de renouvellement du bail établi au profit de monsieur Abdoulaziz Ahmed ALIBHAÏ…». Signé Sansan Kambilé, hier directeur des affaires juridiques au ministre de la Construction, aujourd’hui Ministre de la Justice dans l’actuel gouvernement Patrick Achi.
Le chemin de croix et croque en jambe administrative
Consolidé alors dans ses droits par l’Arrêt n°43 du 29 novembre 2006 de la Cour Suprême et l’Arrêté du ministre lui-même, heureux, Abdoulaziz Ahmed ALIBHAÏ le 19 septembre 2007 adresse une correspondance au Ministre de la Construction et de l’Urbanisme en vue, enfin du renouvellement de son bail portant sur les titres fonciers N° 11733 et N° 11734. Le ministère réceptionne la correspondance. Mais, avec astuce, celui-ci conseille au requérant à suivre les démarches administratives nécessaires à la transformation des titres fonciers N° 11733 et N° 11734 qu’il détient, en titre Fonciers Urbains.
Toujours courageux, l’opérateur économique Abdoulaziz Ahmed ALIBHAÏ, poursuivant ses démarches administratives saisit, le 14 mars 2008 par une autre correspondance le ministre de la Construction, de l’Urbanisme et de l’Habitat au moment des faits, toujours, Monsieur Marcel Amon-Tanoh, en vue d’une acquisition définitive des parcelles formant les titres fonciers N° 11733 et N° 11734, après transformation du bail rural dont il est bénéficiaire en titres fonciers urbains. Grosse surprise 2014 avec un acteur monstrueux… A SUIVRE ACTE 2.
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HERVE MAKRE