Crise au Niger-Le 26 Juillet, le président Mohamed Bazoum du Niger était renversé par la garde présidentielle, cette unité qui était censée le protéger. Réunis en sommet extraordinaire le 30 Juillet dans la capitale fédérale du Nigéria, les Etats de la Cedeao Nigéria en tête, ont donné un ultimatum d’une semaine au général Tiani pour restaurer la légalité constitutionnelle, sous peine d’une intervention armée pour l’y contraindre.
Si l’opération avait lieu, ce ne serait pas la première fois que la CEDEAO aurait eu recours à la force contre un Etat. En 1990, sous commandement nigérian, l’ECOMOG une force régionale, fut mise sur pied et intervient au Libéria alors en pleine guerre civile. La force installa un gouvernement de transition qui resta en place jusqu’en 1996. L’ECOMOG intervint de nouveau de 1999 à 2003 lorsque les affrontements reprirent, pour installer de nouveau un gouvernement de transition.
En Mars 1998, toujours sous commandement nigérian, cette force intervint en Sierre Leone pour remettre en selle le président démocratiquement élu, Ahmad Tejan Kabbah qui avait été renversé par un junte dirigée par le Commandant Johnny Paul Koroma. Une force de la CEDEAO participa aussi à la stabilisation de la situation en Guinée Bissau vers la fin des années 90. Enfin plus récemment en Gambie en Janvier 2017, sous commandement sénégalais, la CEDEAO intervint pour contraindre le dictateur Yahya Jammeh à céder le pouvoir à Adama Barro, déclaré élu par la commission électorale au terme de l’élection de Décembre 2016.
Dans les trois cas, l’on avait prédit « l’enfer » aux troupes ouest africaines qui ont toujours pu installer l’autorité légitime. C’est donc dire que techniquement la CEDEAO a du recul, elle dispose d’une « expérience » sur la question des interventions dans un Etat membre. Pour autant une intervention militaire est-elle absolument nécessaire pour déloger le général Tiani du pouvoir à Niamey ?
De lourdes sanctions sont entrées en action contre ce pays le 30 Août dernier. Le Niger importe les produits pétroliers finis de ses voisins, soit directement (Nigéria), soit à partir de leurs ports (Bénin). Il importe 70% de son électricité du Nigéria. Si l’embargo sur ces deux produits est strictement maintenu, l’activité marchande doit rapidement être impactée. La banque centrale ( La BCEAO ) sise à Dakar, a arrêté ses concours au gouvernement nigérien, et aux banques commerciales opérant dans le pays. Il n’existe aucune parade contre cette sanction. Elle ne peut pas être contournée. Très vite, le pays sera à court de liquidités, dès que les réserves dans les banques et dans les coffres du trésor public seront épuisées.
D’aucuns peuvent douter de l’efficacité de ces sanctions en prenant le cas du Mali qui a pu tenir six mois. On oublie que dans le cas du Mali, le carburant et l’électricité n’étaient pas interdits de commerce. Le Mali continuait de les importer. On oublie également que la BCEAO avait cessé ses concours au gouvernement, mais continuait d’approvisionner les banques du pays en liquidités, ce qui permettait au pouvoir malien de se financer auprès de celles-ci pour ses besoins les plus urgents. Dans le cas du Niger, on ne retrouve pas ces mesures d’atténuation. L’embargo est total, et à très court terme, les effets devaient se faire ressentir.
Le putsch du Niger est un « copié-collé » du putsch en Guinée Conakry de Septembre 2021.
Nous avons affaire à des officiers qui se sont levés et de façon unilatérale ont pris le pouvoir. Le modus operandi est le même. Dans un premier temps prendre en otage le président ( qu’on est censé surveiller ), afin de prévenir une riposte de l’armée. Dans un second temps, engager des tractations pour la rallier. Ce sont des ambitions personnelles qui se sont exprimées par ces putschs. Les dirigeants de la CEDEAO sont unanimes sur le fait qu’il faut absolument dissuader ce genre d’initiatives, en faisant preuve d’une extrême fermeté cette fois.
Les populations souffriront certainement des mesures mises en place, et plus certainement encore de l’intervention si elle a lieu, car elle va créer un flottement du pouvoir qui pourra causer des pillages. Des populations qui sont déjà fortement éprouvées. Pourtant La nécessité de tenir compte de la situation des plus vulnérables, ne doit pas entraver, ne doit pas paralyser les actions à entreprendre pour protéger les pays, donc en définitive les populations, des putsch.
Car un putsch n’apporte ni démocratie, ni développement. Un putsch est un facteur d’appauvrissement d’une nation. L’incertitude et le manque de visibilité des périodes de « transition » freinent l’investissement. Tout est à l’arrêt, les prix grimpent et la population devient plus pauvre. Laisser la gangrène prendre parce qu’on ne doit pas davantage faire souffrir les plus démunis, entraînera encore plus de démunis dans le pays, parce que l’instabilité institutionnelle ne permettra pas à l’investissement et à l’emploi de repartir.
Faut-il laisser les sanctions agir ou faut-il y aller militairement ? Dans tous les cas, la solution militaire ne pourra pas se mettre en œuvre du jour au lendemain. Elle va nécessiter la mise en place de la logistique, ce qui va prendre un « certain temps », qui va permettre à la fois aux sanctions de se faire ressentir, et sera certainement mis à profit pour négocier et faire comprendre au général Tiani qu’il est totalement cerné, et que la seule sortie pour lui est de céder le pouvoir- Douglas Mountain-Le Cercle des Réflexions Libérales.
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