Régler ou garantir des emprunts avec ses matières premières : une démarche courante aujourd’hui
L’information est parue sur un site d’investigation français en Décembre dernier (Africa Intelligence), et fut reprise par plusieurs médias locaux. Le président Ouattara a formellement démenti le 15 Janvier lors de la cérémonie de présentation des vœux, instruisant au passage le ministre de la justice « d’engager des poursuites contre ce site ».
Pourtant l’approche consistant à régler ou garantir des emprunts avec ses matières premières n’a rien d’inédite, elle est parfaitement courante de nos jours, elle s’apparente aux prêts chinois que les Etats remboursent en matières premières.
Aujourd’hui, le Congo Brazzaville, l’Angola, le Soudan du Sud entre autres, remboursent en pétrole les prêts contractés auprès de la Chine pour la construction de leurs infrastructures. En Côte d’Ivoire, la dette contractée pour la construction du palais de la culture a été remboursée en partie en cacao. Pour les infrastructures plus récentes construites par la Chine, le barrage de Soubré, l’élargissement et l’approfondissement du canal de Vridi, le second terminal à conteneur du port d’Abidjan, l’autoroute Abidjan-Bassam etc., il n’est pas exclu que ces mêmes clauses figurent dans les accords de prêts.
La Chine entend ainsi se prémunir contre tout éventuel défaut de paiement. Vous n’avez pas de liquidités, alors vous réglez avec vos matières premières. Les occidentaux voient certes la pratique d’un mauvais œil, mais la chose se poursuit depuis une trentaine d’années, preuve que tout le monde y trouve son compte.
Que la Côte d’Ivoire veuille aujourd’hui garantir un emprunt avec son pétrole ne devrait pas faire couler autant d’encre, certains États réglant leurs dettes avec leur pétrole.
D’autre part ici, il ne s’agit que de garantir l’emprunt, pas de le régler de prime abord. Une garantie n’intervient que lorsque le débiteur ne parvient pas à honorer la dette.
La production du gisement ‘’baleine’’ (du moins la partie de la production revenant à la CI), ne sera saisie par les créanciers que si la CI fait défaut sur la dette, pas avant. Or le pays compte précisément sur les recettes générées par ce gisement pour honorer ses futures dettes.
Ainsi, que ce soit en « amont » ou « en aval », ce gisement va désormais être au cœur de la stratégie d’endettement de la Côte d’Ivoire. D’ailleurs le site qui a donné l’information nous apprend que la pratique fut déjà mise en œuvre du temps de l’ex-président Laurent Gbagbo, qui aurait utilisé la production cacaoyère et gazière pour obtenir des conditions plus favorables sur des emprunts, en d’autres termes les garantir.
Avec une production pétrolière de 150 000 barils/jour en régime de croisière à partir de 2027, le gisement va générer quelque 03 milliards de dollars par an selon les projections.
Lorsque le pays exercera ses pleins droits sur ce gisement, il va capter plus de la moitié de cette manne, ce qui lui permettra de gravir un palier supplémentaire dans le montant des sommes qu’il va mobiliser sur les marchés.
Avec des réserves certifiées de 2.5 milliards de barils de pétrole, et 3.300 milliards de pieds cube de gaz associé, le pays en a pour plus de quarante années d’exploitation sur ce gisement. C’est à ce jour la plus grande découverte dans le bassin sédimentaire ivoirien.
Par Douglas Mountain -Le Cercle des Réflexions LibéralesL
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